Personnes concernées par la loi Ségur : catégories et implications
Deux chiffres, mille débats : 183 euros. C’est la somme qui a cristallisé les espoirs, les crispations et les inégalités dans tout un pan du secteur social et médico-social. Depuis le Ségur de la santé, la reconnaissance salariale s’est transformée en une mosaïque de décrets, de listes mouvantes et de statuts qui, chaque année, font et défont les frontières de la revalorisation.
Entre 2022 et 2023, le gouvernement a multiplié les ajustements réglementaires pour élargir, ou restreindre, le cercle des bénéficiaires. Résultat : certains établissements accordent le fameux complément, d’autres non, parfois au sein d’une même structure. Cette valse des décrets laisse sur le carreau des professionnels qui exercent pourtant le même métier que leurs collègues mieux lotis. Au fil des modifications, c’est la cohérence de la politique salariale qui est interrogée, et la lisibilité pour les agents qui se brouille.
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À qui s’adressent les revalorisations du Ségur ? Un panorama des catégories concernées
Le Ségur de la santé a ouvert la voie à des hausses de salaires pour une large palette de professionnels des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS). Mais ce panorama reste inachevé. Depuis 2020, la liste des métiers concernés s’est étoffée au fil des textes officiels, sans jamais englober l’ensemble du secteur. Les principaux bénéficiaires partagent un point commun : ils œuvrent dans la sphère sanitaire, sociale ou médico-sociale et assurent souvent un accompagnement social ou éducatif quotidien.
Dans la fonction publique hospitalière, les infirmiers, aides-soignants, agents de services hospitaliers et personnels socio-éducatifs ont ouvert la marche. Puis, par vagues successives, les travailleurs sociaux tels que les éducateurs spécialisés, assistants sociaux ou moniteurs-éducateurs ont été intégrés à la liste, sous réserve de l’évolution des textes. Du côté de la fonction publique territoriale, les avancées se font plus au cas par cas, selon les décrets publiés et les choix des collectivités.
Voici les grandes catégories aujourd’hui concernées par les revalorisations :
- Agents publics employés par des structures sanitaires, sociales et médico-sociales relevant du public
- Salariés exerçant dans des établissements privés bénéficiant d’un financement public significatif
- Employés du secteur associatif, en fonction de leur activité principale et du cadre conventionnel appliqué
Mais la question de la justice entre métiers reste vive. Certains professionnels de l’accompagnement social, notamment dans le privé non lucratif, sont toujours laissés de côté. Les métiers de conseil, d’information ou d’accompagnement, éducateurs de jeunes enfants, conseillers en économie sociale et familiale, voient leur éligibilité évoluer au gré des décrets. Cette logique de listes, parfois arbitraire, nourrit les revendications sur le terrain et interroge la cohérence générale du dispositif dans tout le secteur sanitaire, social et médico-social.
Comment savoir si vous êtes éligible à la prime Ségur ? Les critères à connaître
La prime Ségur ne concerne pas tout le monde, loin s’en faut. Pour savoir si vous faites partie des personnes concernées par la loi Ségur, il faut d’abord regarder où vous travaillez. Seuls les agents exerçant dans des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) financés majoritairement par l’Assurance maladie ou la CNSA entrent dans le périmètre. Cela inclut aussi bien des structures sous tutelle des Agences régionales de santé (ARS) que des établissements gérés par des collectivités ou des associations financées sur fonds publics.
Deuxième critère incontournable : votre statut professionnel. Les agents titulaires de la fonction publique hospitalière, les salariés de droit privé employés dans des structures sous financement public, et certains personnels territoriaux figurent dans la liste, à condition que leur métier soit explicitement mentionné dans les décrets : infirmiers, aides-soignants, éducateurs spécialisés, assistants sociaux, moniteurs-éducateurs, agents de services… L’activité exercée en tant que fonction principale fait foi pour l’attribution du complément de traitement indiciaire (CTI) ou de la prime revalorisée.
Pour s’y retrouver, il est conseillé de consulter les textes réglementaires, en particulier le décret relatif au versement de la prime Ségur, ainsi que les circulaires d’application. Dans le secteur privé, tout dépend de la convention collective et des accords signés localement. Le service RH de l’établissement est généralement le plus à même de renseigner sur l’application du dispositif, en lien direct avec les modalités de financement publiques et le cadre de la sécurité sociale.
Ce que changent les derniers décrets pour les travailleurs sociaux : impacts concrets et perspectives
Les textes publiés récemment sur la revalorisation des travailleurs sociaux ont redéfini les règles du jeu. Le complément de traitement indiciaire (CTI) s’étend désormais à des métiers qui n’y avaient pas droit jusque-là : assistants de service social, éducateurs spécialisés, conseillers en économie sociale et familiale… Dès lors que ces professionnels interviennent dans des services sociaux ou établissements médico-sociaux, leur salaire est augmenté de façon tangible.
Cette avancée concerne aussi certains agents de la fonction publique territoriale et du secteur associatif, dès lors que leur structure bénéficie d’un financement public. Le CTI se matérialise chaque mois sur la fiche de paie, rapprochant progressivement les travailleurs sociaux du régime de la filière sanitaire en matière de rémunération.
L’enjeu ne se limite pas à une question de chiffres. Cette revalorisation, c’est aussi une reconnaissance, longtemps attendue, de la place des travailleurs sociaux dans la société française. Mais elle impose aux employeurs d’adapter leur politique de gestion des ressources humaines, pour assurer l’équité entre agents de statuts différents, parfois au sein d’une même équipe.
L’impact de ces mesures dépasse la seule question de la fiche de paie. C’est tout l’écosystème du secteur sanitaire, social et médico-social qui se réorganise, au nom de l’attractivité et de la fidélisation des professionnels de l’accompagnement. Pour beaucoup, la perspective d’une meilleure valorisation de l’expérience acquise (Vae) et de parcours professionnels plus fluides reste à concrétiser. Les prochains arbitrages gouvernementaux pourraient, une fois de plus, redessiner la carte du secteur et rebattre les cartes pour les oubliés du Ségur.
Dans le secteur social, la frontière entre inclusion et oubli se joue parfois à un décret près. Demain, qui sera du bon côté ?
